Le phénomène tentaculaire des cabinets de conseil :
La gabegie financière Vs le serrage de ceinture !
Le récent rapport des sénateurs BAZIN et ASSASSI alerte sur l’influence croissante des cabinets de conseil privés auprès des politiques publiques. Selon les analyses les plus optimistes, le volume des contrats s'est multiplié par 2,4 depuis 2018, avec un coût passant de 372 M€ à 894 M€ en 2021.
Quand on veut noyer son chien, on dit qu'il a la rage !
Le recours à ces cabinets a commencé avec la fameuse Révision générale des politiques publiques (RGPP) du gouvernement Fillon, en lien avec la Nouvelle gestion Publique. Cette RGPP visait à réduire les effectifs publics, ce qui a engendré, par là-même, un affaiblissement des capacités d'expertise de l'Administration. Il a donc fallu solliciter, en partie, des sociétés externes pour compenser les besoins, avant que cela de devienne progressivement la norme dans l'action des gouvernements. On peut alors s’interroger sur la nécessité de réduire le nombre des fonctionnaires si c'est pour les remplacer par ces prestataires privés ?
Une montée en charge exponentielle depuis 2018...
A présent, les sénateurs s'emploient à démonter que cette « norme » se transforme en dépendance : « Le recours aux consultants est ainsi devenu un réflexe pour un État qui donne parfois l'impression qu'il « ne sait plus faire », malgré le dévouement de ses propres agents. » Parmi les études confiées récemment aux cabinets, on y trouve la réforme des APL, le déploiement des radars routiers, la gestion de la campagne vaccinale du Covid ou encore la très décriée réforme des retraites, finalement abandonnée.
A titre de comparaison, 894 millions d'euros représentent sur 1 an :
→ 11 420 emplois moyens de la FPE, primes, heures supplémentaires et charges comprises ;
→ 0,7 % d'augmentation du point d'indice ;
→ 77 % du budget de la Douane ;
→ 4 380 euros de prime mensuelle pour un douanier.
Mais aussi :
→ 45 200 salariés au SMIC, toujours charges comprises ;
→ le coût global pour l'éducation de 110 224 élèves ou étudiants ;
→ 875 000 journées d'hospitalisation classique, soit près de 2 400 lits d’hôpital ;
→ le coût moyen du chauffage pour 532 000 logements ;
→ 0,27 % d'augmentation générale pour tous les retraités.
Mais pourquoi donc les réduire si de l'aveu même du président, cela ne le choque pas ?
Le 30 mars, le chef de l’État a missionné deux ministres pour animer une conférence de presse sur le sujet. S'ils déclarent haut et fort qu'il n'y à « rien à cacher » et que le recours aux cabinets de conseil est « parfaitement assumé », ils ajoutent tout de même que des améliorations sont nécessaires. Ils veulent « réarmer l'État pour renforcer les compétences internes » et fixent l'objectif de « réduire d'au moins 15 % le recours aux prestations de conseil externe » en 2022. No problemo donc ?
Outre la pertinence de ces recours et l'utilité de ces conseils, sans oublier l'atteinte possible à la souveraineté de l’État, en confiant des informations stratégiques à des entreprises parfois étrangères, nous notons que l'effort d'économie attendu sur un an représente quand même 134 M€, soit plus de 9 fois le coût social de la réforme du transfert des missions fiscales (TMF) en Douane, la quasi totalité de son contrat d'objectif ou encore 1 700 emplois annuels moyens de la Fonction Publique d’État (FPE).
Le service public sacrifié pour quel bénéfice ?
À l'heure où l'inflation galope à 4 %, sans aucune compensation du pouvoir d’achat des fonctionnaires, à qui on dit clairement : serrez-vous la ceinture ! À la veille d'une destruction programmée des grilles salariales, et après tant d'années de stigmatisation des personnels du public, nous pensons au contraire qu'il y a largement de quoi être choqués ! L’État devrait plutôt investir dans ses services publics au lieu d’enrichir des groupes privés, et étrangers pour la plupart, dont la plus-value est loin d'être évidente...