Déclaration Liminaire du GT DI ARA relatif à la Surveillance - 14 mars 2024

Monsieur le Président,

Vous avez proposé d’engager des échanges avec les représentants du personnel concernant la surveillance au sein de la DI Auvergne Rhône Alpes. Nous vous remercions de cette action qui va permettre nous l’espérons de dégager des pistes d’évolutions structurantes pour les agents qui sont très nombreux à attendre de l’administration des avancées concrètes sur des problématiques que l’UNSA Douanes évoque depuis des années au niveau national via sa structure dédiée que constitue « l’union des douaniers en tenue», unique structure de ce type.
Au niveau local, notre organisation n’est pas en reste sur le sujet puisque nous avons toujours eu à cœur d’être force de proposition pour que le collectif en sorte amélioré.

Nous aimerions vous transmettre à l’occasion de cette déclaration liminaire quelques grandes lignes relatives à ce qui nous parait nécessaire pour réfléchir conjointement sur les sujets que nous vous avons transmis. 
Pour l’UNSA Douanes, chacun de ces sujets ne peut etre envisagé sans une vision d’ensemble de ce que nous sommes, et d’où va notre administration. 
En effet,depuis trop longtemps, nous constituons une variable d’ajustement, tantôt vus comme de simples agents des finances en uniforme lorsqu’il s’agit de parler rémunération et régime de retraite, tantôt comme des agents spécialisés sur la criminalité organisée transfrontière lorsqu’il s’agit de répondre aux exigeances des projets annuels de performance du programme 302 de la loi de finances ou lorsqu’il convient de suppléer leurs homologues du ministère de l’intérieur. 
L’UNSA Douanes souhaite porte la parole de ces agents de votre inter-région très investis, toujours efficaces pour remplir les sommiers contentieux, qui n’en peuvent plus de voir tourner en rond autour des problématiques sans jamais rentrer dans le cœur des sujets structurants. 
Nous comptons sur vous Monsieur le Président, pour faire savoir à qui de droit l’importance de ne plus rester immobiles face à l’évolution particulièrement rapide et inquiétante de la délinquance en Auvergne Rhône-Alpes comme sur l’ensemble du territoire national

En premier lieu, permettez nous de revenir sur la complémentarité DOD-BSI. Ce sujet, vous le savez, nous tient à cœur. 
La question écrite concernant la doctrine d’emploi d’intervention conjointe brigades/DOD de Lyon qui vous avait été adressée par notre organisation reprend notre vision d’un sujet essentiel concernant l’évolution des BSI. 
C’est un sujet brulant au niveau local pour les agents des brigades,puisque les services conjoints se multiplient par volonté administrative, entrainant des frictions et des incidents pour les agents des brigades.
La délinquance douanière a fortement évolué ces 20 dernières années, se structurant, se densifiant, et se professionnalisant dans des réseaux toujours plus audacieux dans leurs prise de risque. Il devient urgent de mettre en place des services d’intervention locaux, à l’instar de nos partenaires engagés également dans les grands trafics, pour continuer à œuvrer en sécurité pour l’ensemble des protagonistes. Nous portons ce sujet à bras le corps depuis des années. Les incidents constatés au niveau national et local ces dernières années comme ces derniers jours démontrent la légitimité de notre analyse.
Il va de soit que la montée en compétence et la disponibilité doit s’accompagner d’un régime indemnitaire adapté et d’une reconnaissance des acquis professionnels.

Le sujet du renseignement au sein des brigades est un élément corolaire de l’évolution nécessaire qui peut être menée au niveau local. Les Brigades ont une culture de la collecte et du traitement du renseignement qui est atout indéniable pour la petite administration que constitue la douane. Cette pratique n’est cependant pas sans risque comme on l’a tristement constaté à de nombreuses reprises. C’est dans cette optique que notre service de renseignement douanier spécialisé a professionnalisé radicalement ses protocoles en la matière. Dans une logique de complémentarité avec les services compétents et formés en la matière, il nous apparaît nécessaire de cadrer plus spécifiquement le rôle de chaque acteur. Les CRPC ont d’ailleurs un rôle à jouer sur ce sujet. Il nous paraît éminement nécessaire que cette exploitation du renseignement opérationnel local ne soit plus directement l’apanage des agents en tenue, mais au contraire d’étoffer ces CRPC en leur donnant la capacité d’enquête locale, en fusionnant par exemple le GRITT avec ces CRPC en une entité recevant les informations glanées par les agents de terrain,l’exploitant et éventuellement traitant les relations avec des aviseurs d’un niveau à définir, et rendant le renseignement opérationnel pour l’orienter vers le service opérationnel compétent. Le cloisonnement des actions en la matière assurerait une sécurité accrue pour les agents.

Ces évolutions préalablement évoquées doivent s’envisager avec la création de services de procéduriers: L’évolution du droit douanier intervenue avec la loi douane de 2023 et celle attendue avec la recodification du code des douanes est la preuve par l’exemple d’une des revendications anciennes de l’UNSA Douanes. Comme le dit l’adage, on ne peut pas être «au four et au moulin », en d’autres termes ,il apparaît irréaliste d’etre aguerri professionnellement en matière d’intervention complexe (entrave de convois, livraisons surveillées par exemple) et etre à jour d’une réglementation douanière toujours plus exigeante. La création d’un service spécialisé sur la rédaction de procédure contentieuse lourde permettrai de décharger les agents en charge des contrôles de la charge mentale que constitue la rédaction du contentieux douanier, d’en professionnaliser le traitement et de sécuriser juridiquement ceux-ci. 
Deux formes apparaissent possible, à savoir un service dédié de type « quart» tel qu’existant en Police par exemple, ou des agents spécialement qualifiés et indemnisés pour cela sur le modèle des OPJ de permanence de Gendarmerie. 
Il va de soit que la montée en compétence et la disponibilité doit s’accompagner d’un régime indemnitaire adapté et d’une reconnaissance des acquis professionnels.

Sécurisation et adaptation des locaux : Les brigades des douanes sont pour nombre d’entre elles dans des locaux qui n’offrent quasi aucune sécurité passive ou active ou alors d’un niveau qui ne semble pas correspondre à l’état de la menace criminelle prise en charge par ces services. En effet, nombre de brigades n’ont aucune porte blindée, aucune sécurisation d’accès privatif permettant d’assurer un périmètre d’accès restreint en cas d’interpellation à risque, et pour l’écrasante majorité n’ont pas de système de video surveillance des abords immédiats et des parkings permettant de prévenir un certain nombre de risques. La encore, il est urgent de s’adapter aux évolutions des délinquants interpellés. La Belgique, les Pays-Bas ou l’Espagne sont malheureusement nos précurseurs sur le chemin emprunté par des délinquants transfrontières déterminés. 
La très médiatique commission d’enquète sénatoriale relative au narcotrafic ne fait pas un constat différent. Nous sommes dépassés, inadaptés et face à une immense menace en croissance exponentielle.
Nous alertons sur une nécessaire prise de conscience quand aux individus que les agents des brigades interpellent et aux enjeux pour les réseaux entravés. Il convient de faire monter sérieusement à minima la sécurité passive des locaux, la sécurité active pouvant etre dévolue en cas de nécessité à des brigades de second niveau entraînées et formées en la matière, alors même que le code de la sécurité intérieure confère aux agents des douanes des prérogatives pour sécuriser des locaux dont ils ont la garde.
Bien évidemment, l’adaptation des services ne peut se faire qu’avec le corollaire de l’adaptation des doctrines. En effet, nombre de celles en vigueur dans notre administration pour la surveillance datent des années 1990. La délinquance douanière a évolué, les missions douanières également. Il convient d’en faire autant pour les doctrines selon l’UNSA Douanes.

Concernant donc les doctrines Il convient en premier lieu de garantir un équilibre vie professionnelle/vie personnelle. C’est un préalable qui est la clef de voûte de tout service opérationnel fonctionnant de manière efficace. Assurer un équilibre par un régime de travail adapté est une nécessité. Ce n’est un secret pour personne, dans la parité syndicale comme administrative, que les contraintes pour les services opérationnels ont enflé jusqu’à atteindre une indigestion créant des frictions et des irritants, pour l‘évoquer en novlangue administrative. Pour assurer cet équilibre, il apparaît primordial de définir précisément les règles applicables en matière de durée de travail, de repos, de rappel des agents et et de modifications des cotes de service. Les BOD sont devenus des navires à la dérive qui ne satisfont plus personne car contournés quotidiennement pour réaliser les missions. Adapter notre régime de travail aux attendus professionnels devient un travail 
nécessaire. Louvoyer pour éviter ce sujet risque d’entraîner des étincelles à court terme, si ce n’est pas déjà le cas, principalement dans les Brigades, et plus singulièrement les BSI.

Un second point relatif aux doctrines administrative qui nous apparaît crucial est celui du chef d’équipe en surveillance : Il s’agit là aussi d’une revendication historique de notre organisation. Le Chef d’équipe, de catégorie B ou parfois même C, est la clef de voûte des dispositifs en surveillance, il encadre, coordonne, dispose des agents, se voit conférer des responsabilités en matière de désarmement, des responsabilités vis à vis des marchandises saisies et des fonds, est responsable pénalement des dispositifs d’interception et d’intervention mis en place, doit connaître une réglementation changeante sur le bout des doigts, le tout, sans aucune reconnaissance statutaire ou financière. Actuellement, nombre d’agents ne veulent plus être chef d’équipe. Parce qu’ils ne se sentent pas les épaules pour cette mission ou parce qu’ils n’en veulent pas les responsabilités sans contrepartie. Il apparaît nécessaire pour l’UNSA Douanes de sortir de cette impasse par le haut en proposant une professionnalisation de la fonction avec l’attribution d’un statut particulier, d’une reconnaissance administrative des acquis de la fonction et une gratification financière conforme à la responsabilité exercée.
Nous le savons tous,c’est bien l’ensemble du dispositif douanier de la surveillance qui est à rénover et non pas simplement un coup de peinture pour faire propre.

Les enjeux sont immenses, et les attentes des agents tout autant. L’UNSA Douanes sera au rendez-vous des échanges et des échéances sur le sujet, espérant que l’administration a enfin entendu l’impérieuse nécessité de ne plus se défiler devant l’adversité de sujets difficiles et techniques mais essentiels pour ne pas devenir un corps administratif dispensable, dispendieux et obsolète.