Nous sommes (à peine) venus vous dire que nous ne viendrions pas.
Monsieur le Président,
Nous vous connaissons peu, mal, compte tenu du contexte sanitaire dans lequel vous avez pris vos fonctions. Et pourtant, si vous étiez de ceux qui agissaient pour que notre maison commune, douane, soit confortée, il y en aurait quelque part des traces…
Comme vos prédécesseurs, comme vos lieutenants, comme notre directrice générale même, vous déclinez une volonté politique de destruction de notre administration. Vous tentez de nous convaincre, de vous convaincre, que c’est pour le mieux. Que le service rendu sera supérieur avec à la clé tous les éléments de langage de ce temps insupportable : interlocuteur unique, efficience, …
Miracle amer de la langue qui est, comme le disait Diogène, la meilleure et la pire des choses.
Après avoir goûté la concentration du recouvrement, du dédouanement, de la fiscalité énergétique, le resserrement des réseaux et avoir pu par nous-mêmes nous rendre compte de tout ce qui avait été perdu : accompagnement des usagers, contrôles de proximité, formation, appui des services support, temps de liaison imbéciles pour effectuer des contrôles sur les points sensibles (pour mémoire, près d’Aragnouet, naguère, il y avait une petite brigade qui tenait l’axe et le tunnel, désormais il faut 2h30 aux brigades les plus proches pour s’y rendre), la perte du soutien des services réglementaires que la loi ESSOC a mis en embolie et de formation professionnelle qui gèrent comme ils le peuvent la pénurie fautive.
Ce n’est pas pour rien que les évaluations des réformes passées que nous réclamons à la DG se font attendre. Parce que, derrière le performatif « modernisation » « simplification » « amélioration » que vous vendez comme de la poudre de perlimpinpin à nos concitoyens qui y croient de moins en moins, c’est sur un champ de ruines que vous exercez désormais votre autorité. Et ce n’est pas fini !
Et qu’on ne vienne pas nous dire que cette agitation permanente a amélioré de quelque manière le fonctionnement de notre administration : une charge de travail harassante, une complexité réglementaire que la direction générale elle-même ne maîtrise pas, une succession de mauvaises décisions. Monsieur le président, si on construisait les administrations comme on construit un bâtiment, il y a bien longtemps que nous serions ensevelis sous les décombres !
Mais qu’attendre d’un Ministre qui ment à la représentation nationale ? Qu’attendre d’un ministre qui présente son « plan de lutte contre la douane » dans l’Hémicycle, sans même se reprendre ? Qu’attendre d’un ministre qui tarde à écrire ce courrier réaffirmant l'unité de la douane dans ses deux branches que nous attendons tous ?
Nous sommes ici fugacement pour porter la parole de nos collègues, experts de leur travail, qui constatent ce saccage et qui, conscients des enjeux, s’en désolent et s’inquiètent pour leur avenir et, de manière plus large, pour celui d’un pays et d’une société qui ont été abandonnés à la rapacité des lobbies qui tirent argument de la liberté d’entreprendre et de la concurrence libre et non faussée pour se gaver.
Et comme si ce n’était pas assez, afin d’empêcher les collègues de confronter leurs expériences, leurs points de vue, de discuter de l’intérêt général, d’élaborer des revendications et des adresses, la direction générale – appuyée par le ministère – fait le choix d’interdire ce débat partagé à l’occasion d’une réunion d’information syndicale nationale.
Manifestement, plus dangereux que le virus, il y a les consciences qui s'éveillent et qui risquent de bientôt vous demander des comptes !
Alors, tout ce que sait faire le pouvoir c’est bâillonner ces vilains ?
Nous serons absents à ce CTSD, mais nous ne serons pas muets. Nous portons la voix de la colère de nos collègues. Leur sentiment d’injustice, leur incompréhension, leur attachement à leur travail et à leurs missions au service de l’intérêt général.
Il est temps que vous les écoutiez un peu plus au lieu de balayer leurs arguments d’un revers de main quand ils vous parlent de ce qu’ils font et des moyens qui manquent pour faire convenablement ce qui leur revient sans avoir les yeux rivés sur une misérable enquête temps, qui part des moyens pour dire ce que sont les besoins.
Il est temps que le ministère, et vous avec, repreniez ancrage dans la réalité !