L’enfer est pavé de bonnes intentions… Mais en attendant, doit-on claquer notre démission ?

Monsieur le Président,

Avant d’aborder « le vif du sujet » de ce CSA, nous souhaitons revenir brièvement sur quelques étapes importantes de la vie du jeune ONAF :

  •  Sa conception « dans la plus stricte intimité » à la fin de l’année 2023, en l’absence totale d’information préalable des représentants du personnel.

  •  Après les premières annonces, pendant une réunion provoquée d’ailleurs par les représentants du personnel… l’organisation de groupes de travail voués à l’échec, sans véritable contenu, car sans la base d’un projet de service présenté par l’administration.

  •  Le projet de décret de création de l’ONAF sanctionné au CSA du 14 novembre 2023 par un vote contre à l’unanimité des représentants du personnel.

  •  Un sondage où la grande majorité des collègues interrogés s’est opposée à la création de cet office, dans les conditions présentées.

  •  Une visite à notre directrice générale des Douanes puis une intervention au CSA ministériel où nos interlocuteurs reconnaissaient l’état d’impréparation du dossier ONAF et notamment la nécessité de se pencher très rapidement sur l’état des effectifs. Les organisations du personnel sont à l’origine de la mise en place de cet audit et n’ont pas même été informés de sa mission, de ses orientations…, bref d’une évolution possible du service !

  •  depuis le 1er mai 2024…, rien de changé. L’ONAF est bel et bien né sans qu’aucune fée ne se soit penchée sur son berceau, ceci malgré les déclarations enflammées qui avaient présidé aux annonces politiques du début d’année 2023. Les personnels du service sont très inquiets et leurs représentants du personnel (du moins l’UNSA) ne sont pas en mesure de leur apporter des éléments d’information…, qu’ils n’ont pas !

Ce petit rappel Monsieur le directeur de l’ONAF, président du CSA, aussi pour répondre à l’une de vos récentes interventions auprès de douaniers, inspecteurs principaux nouvellement promus, où nous a-t-on rapporté, vous avez assuré que les « opposants » internes à l’ONAF étaient constitués d’une poignée de vieux agents (peut-être même syndicalistes pour certains!), réfractaires à tout changement…, donc !

Nos arguments, en bref :

→ non pas un refus dogmatique à tout changement mais le refus d’un changement que nous considérons beaucoup trop prématuré. Le SEJF né en 2019 est encore, nous le répétons encore, à un stade d’appropriation de sa nouvelle structure. ODJ et OFJ cohabitent mais n’ont pas crée un service. Le SEJF devait avant tout se structurer et se renforcer considérablement, notamment en termes d’effectifs, enquêteurs, personnels administratifs, missions supports, avant d’envisager « autre chose ».

une « formule OFFICE » qui ne nous convainc toujours pas, pour plusieurs raisons, dont une efficacité très disparate (pour le moins) des offices et à l’inverse une carte efficacité du SEJF avec ses particularismes, qui nous semblait devoir être privilégiée. Ajoutons que l’ONAF restera un office « de seconde zone», sans auto saisine et sans être un service de renseignement du second cercle.

→ un éparpillement de nos missions à des fraudes dites « aux finances publiques », très volatiles, où le rôle du service méritait d’être préalablement et sérieusement étudié…

→ une réflexion à mener, totalement incontournable, sur une filière « métier judiciaire » s’intégrant pleinement dans un parcours de carrière au sein du service (politique de promotions, de qualification des formations...), au sein de la DGDDI et de la DGFIP.

pour terminer, une prime ODJ (OFJ peut-être), toujours à 50 euros par mois, réévaluée progressivement par le ministère de l’intérieur et atteignant aujourd’hui 150€ par mois…

L’UNSA a porté cette demande auprès de la Direction Générale des Douanes et auprès du Ministre.

Rien ne nous a été véritablement promis mais quelques signaux encourageants ont été envoyés. Il n’est pas très respectueux de nous laisser le pied dans la porte…sans aucune nouvelle depuis le CSA ministériel de décembre 2023.

Le dialogue social, ce n’est seulement des rencontres institutionnelles 2 à 3 fois par an !

Maintenant nos questions directement liées à la création de l’ONAF, qui s’accompagne notamment d’un cahier des charges particulièrement important lié à son « chef de filât » :

1/ Toujours pas de projet de service. Le document transmis est un copier-coller de ce que nous savons déjà, 28-1, 28-2, saisine de la JIRS, compétence du Parquet Européen… Un document pour des lecteurs extérieurs… là également, pas très respectueux des demandes de « feuille de route » des représentants du personnel !

2/ Les effectifs : Le Pôle Investigations dont le rôle central est souligné dans le document transmis : quels effectifs donc pour « participer au pilotage des enquêtes et soutien aux unités locales », « vérifier que les saisines sont le reflet des axes prioritaires d’action du service », et enfin….« animer, coordonner les thématiques de l’ONAF au niveau national et au niveau international » ?

Total des analystes : 0 à très moyen terme,

Total des agents en charge de l’international : 1

Pour l’anecdote… notre chef de filât porte sur pas moins de 6 matières très différentes !

Toujours pour le Pôle Investigations, quels effectifs pour le GAOT ?: un chef de groupe et 3 techniciens en 2021. Il s’agissait déjà d’un effectif pour le moins peu ambitieux, sans aucune projection ni de matériel, ni de personnel formé dans les unités locales…

Nous constatons l’absence de remplacement depuis 2021 d’un collègue parti du groupe (une fiche de poste a t-elle été diffusée ?) et le départ annoncé d’un agent en mutation.Total… restera en septembre… 1 technicien !

Les fiches de postes n’ont pas fait l’objet d’une diffusion élargie dans les unités locales. 

Depuis plusieurs années le principe a été acté en CT d’un recrutement plus ouvert de non ODJ pour les postes d’analystes et de techniciens GAOT.

Où en est-on ?

Sur ce même sujet, rappelons tout de même que notre chef de filât comporte « aussi » des infractions douanières nécessitant beaucoup de travail de terrain, dont le trafic de cigarettes, trafic qu’il est de plus en plus compliqué d’appréhender sans moyens techniques.

La solution est-elle sérieusement de se rapprocher, en local notamment, des services techniques police et gendarmerie pour pallier notre incapacité à mettre en place des dispositifs techniques ???

Parlons enfin de la DAMSI et de la Cellule Nationale Informatique : 5 agents au total…

Pour mémoire…, dès 2020, l’ancienne directrice du SEJF obtenait de la DG +17 emplois Ntech implantés, 2 ans plus tard, il était de nouveau annoncé ces +17 ETPT pour des recrutements de 2023 à 2025 (CT de juin 2022) et la création nécessaire d’une résidence TAI…

Alors effectivement les choses avancent mais...beaucoup, beaucoup trop lentement dans le contexte de création d’un office qui DOIT être opérationnel aujourd’hui !

Ajoutons un détail important, le fait que la DIN DNRED nous lâche gentiment mais sûrement, une direction beaucoup plus sollicitée en interne, qui évidemment va prioriser les dossiers de sa direction.

Que fera-ton alors ? Qui expliquera nos défaillances à nos magistrats, qui risquent fortement de saisir des services en capacité de faire, et non seulement d’en parler.

Nous souhaitons enfin sur ce sujet vous demander des précisions sur une question posée par l’UNSA au CT du 14 novembre 2023… Question : le chef du SEJF a t-il l’assurance de la DG de pouvoir créer et faire prospérer un service NTECH autonome, étant donné la création de la DT DNRED et ses fiches de poste intégrant les missions judiciaires SEJF ?

Réponse : c’est effectivement un sujet qui doit être arbitré par la DG (nous parlons, des niveaux 1 et 2 SEJF)

Quid ?

3/ Les Formations Professionnelles : un manque d'anticipation sur les formations professionnelles à titre général, des nouveaux ODJ en particulier : les formations prévues à la dernière minute, la non-concertation des formateurs durant l'année, de nouveaux un appel « à l’arrache » de formateurs internes… après le départ en mutation du seul formateur du service !

Un audit nous a été annoncé lors d’un CT du 1er juin 2022, avec un rapport devant être communiqué en avril 2023, reporté à plusieurs reprises….Où en est-il ?

En conclusion, pour l’UNSA Douanes, il n’est pas possible d’afficher le cahier des charges du nouvel ONAF dans les conditions décrites. Ce n’est pas sérieux DU TOUT ! C’est un échec !

C’est la crédibilité du service qui va être remise en question, très rapidement d’autant que le flyer ONAF vend… le « haut du spectre », une expression qui depuis longtemps fait sourire les enquêteurs mais qui signifie des dossiers d’ampleur, souvent complexes et techniques, souvent transnationaux, impliquant donc un travail de fourmi chronophage, des personnels support forensic et techniques, des collègues sur le terrain…

Le constat est affligeant !

Pas de projet de service, pas de plan de recrutement à court terme…, même pas de logo validé du service !!

Depuis plusieurs mois, les saisines du service sont de moins en moins nombreuses, nous nous posons la question du pourquoi de cette baisse significative. Serait-ce l’effet ONAF d’un manque de lisibilité auprès des parquets mais aussi auprès de la Douane avec un ancrage est de moins en moins évident !

Les représentants UNSA ont été très présents depuis l’annonce du projet ONAF, se sont pleinement investis pour informer les agents du service mais aussi pour convaincre la directrice générale et les représentants de l’administration au CSA ministériel, de la nécessité de faire évoluer très rapidement les choses, du moins d’avoir l’assurance d’une évolution rapide…, les risques étant rappelons-les encore, le manque de lisibilité du service avec un éparpillement de ses missions et d’une perte de crédibilité étant donné le manque prégnant de moyens.

Enfin, le dialogue social est inexistant malgré nos tentatives d’instaurer des débats fluides. Toujours cette même gestion du « bout du couloir », qui pourtant a largement montré ses limites.

A l’issue de la lecture de cette déclaration liminaire, tous les représentants UNSA envisagent très sérieusement à démissionner de leurs mandats de représentants du personnel si des engagements sérieux de retour à une situation non dégradée de dialogue social n’étaient pas pris et si des réponses n’étaient pas apportées à leur demande dans un premier temps de recentrage sur nos missions douanières et fiscales.


À Ivry, siège de l’ONAF, le 20 juin 2024